Le vallon d'Autre-Monde
C'est un endroit magique, aux confins de ce monde,
On n'y accède pas sans la bénédiction
D'un sylphe ou d'un esprit de la forêt profonde,
En même encore ainsi, c'est avec précaution !
Les arbres sont retors des branches aux racines,
Traîtres sont les ruisseaux qui coulent sans un son,
Lustrant sous leur miroir les pierres assassines
Qui plongent le distrait au milieu des poissons.
Dans les sous-bois des fleurs, aux effluves mortelles,
Disséminent dans l'air leur doucereux poison
Qui te fera danser de folles tarentelles,
Jusqu'à te voir au soir tomber en pâmoison.
C'est un endroit unique habité par des elfes,
Des lutins des sorciers, des licornes aussi,
Un vieux faune et sa flûte, allongé sur le trèfle
A lutiner sa muse au regard indécis...
Le temps s'est arrêté, murmure la légende,
Et s'arrête pareil pour tous ceux qui s'en vont
Loin sous le bois épais, tout au bout de la lande,
Pour prendre ce chemin que garde un fier griffon
Sourd à la facétie. A ses pieds on ne passe
Qu'une fois dans la vie, et quiconque chemin
Rebrousse tout soudain sous ses griffes trépasse,
Etirant sur le sol une nappe carmin...
C'est un lieu mirifique aux bords de l'utopie,
Par la lune bercé de reflets de diamants
Qui projettent sans bruit, sur la flore assoupie,
Un voile de blancheur aux soyeux filaments.
Il s'y déploie un lac aux vagues d'émeraude,
Où baignent sans pudeur des nymphes aux corps nus,
Ambrés par un soleil en quête de maraude,
Sur ces courbes de soie aux faux airs ingénus...
Mais la légende en a, hélas, perdu la carte
Et les rêves sont seuls à savoir le sentier ;
Dès que mes yeux sont clos j'aperçois la pancarte
Qui m'invite à glisser, juste sous l'églantier.
Le 16/05/2015 © JFP