Dans la forêt profonde, après bien des errances
Sous les chaudes couleurs d'un automne indolent,
Je me voyais perdu lorsqu'un rire insolent
L'atmosphère nimba de lugubres fragrances...
La forêt est changeante, et plus ne reconnais
Ni l'arbre sur ma gauche ou le roc à ma droite ;
Une allée se dessine, esquisse maladroite,
Je n'entends même plus l'oiseau qui chantonnait.
"Que se passe-t-il donc ?" me murmure en silence
Mon esprit apeuré. D'un coup le jour s'éteint,
Une brume s'élève et l'angoisse m'étreint
Lorsque vive lueur du fond du bois s'élance !
La surprise est immense et me laisse pantois
Lorsque l'être de feu approche mon visage,
Mais son chant cristallin conte plus doux présage
Qui de par sa magie éclaire le sous-bois.
L'être en réalité était bien mille fées
Qui m'envoûtent déjà de leur vol insouciant,
Viennent vampiriser jusqu'à mon subconscient,
Succubes sans pitié d'esprit frais assoiffées...
Puis les voici bientôt qui tout autour de moi
Elèvent une cage aux couleurs de leurs ailes,
Et le ricanement de ces frêles oiselles,
Si ingénu soit-il, mûrit mon désarroi.
C'est d'un commun accord qu'ensemble elles s'élancent,
Emportant leur fardeau vers d'autres horizons,
Cortège traversant le temps et les saisons
Entre les arbres noirs, filant avec aisance
Vers un ailleurs lointain, étrange et inconnu.
Les fleurs y sont d'argent, d'ambre ou de tourmaline,
Le soleil est de miel, l'eau y est cristalline
Et chacun qui vit là fête le bien venu...
Les arbres par ici ont des feuilles si grandes
Qu'une seule suffit à faire un parasol
Pour savourer la sieste, allongé sur le sol,
Dont chaque créature ici semble friande.
La nuit dans le sous-bois sonnent d'étranges chants ;
Sans doute vaut-il mieux alors ne pas s'y perdre
Et rester près du feu pour y jouter du verbe,
Ou y conter rieur l'après-midi aux champs.
Quelques fois la veillée au moins jusqu'à l'aurore
La place fait tinter, de musique et de cris
Et de rires aussi, quand le petit vin gris
Qu'on boit jusqu'à plus soif pousse à la métaphore.
Je suis resté longtemps en ce lieux mystérieux,
A courir la campagne au milieu des licornes,
Ou escorté d'une elfe aux si étranges cornes
Et aux yeux si profonds que j'en fus amoureux...
Et même si parfois la nostalgie anime
Le fond de mon esprit, grandissent entre nous
D'improbables enfants sautant sur nos genoux,
Que le monde d'un rêve a sortis de l'abîme.
11/2015 © JFP