L'Homme et le Chêne
Le soleil se colore entre ciel et nuages
Des pigments de l'aurore au-dessus du vallon,
Un homme près d'un feu écoute les bruitages
Que lui proposent l'aube et ses mille violons
Une grive se grise, entre les branches vierges
De feuilles et de fleurs d'un vieux chêne dormant,
Aux rayons scintillants qui de la crête émergent,
Se mêlant aux rameaux affectueusement
J'ai quatre-cent-douze ans en ce jour qui se lève,
Se dit non pas l'oiseau mais le chêne bien sûr,
Or funeste est ce jour car armé de son glaive
Un humain va venir me priver de l'azur
Que lui ai-je donc fait, pour que de sa cognée
Il vienne m'écourter, m'ébrancher, me tuer ?
Gé dans son impuissance en est toute indignée,
Moi qui a son bonheur tant ait contribué...
Là-bas sur la montagne au loin cet homme avance
Et s'en va accomplir ce funèbre devoir
Qui à la Terre mère est une ultime offense :
Que l'arbre fut sacré, il ne pouvait savoir...
Il fallut bien trois jours malgré grande vaillance
Pour que tout soit à terre, ébranché, écorcé
Mais au regard des dieux c'était simple inconscience,
Bien que l'homme ne fut par la foudre percé.
Il fallut bien trois ans encore de patience
Avant que ne soit sec le bois sombre et veineux,
L'artiste allait pouvoir, fort de son expérience,
Faire l'oeuvre surgir de ses longs doigts cagneux
Passèrent dix ans pleins à jouer de la gouge
A vriller, mortaiser, graver... Enluminer
De discrets liserés en marqueterie rouge
Et d'un soupçon de jade une anse illuminer,
Dix ans à transpirer au fond de la remise
A poncer, raboter dans les moindres recoins,
A couvrir de copeaux son unique chemise,
A ciseler le bois avec le plus grand soin
Et il put mettre alors le mécanisme en place.
Mais lorsqu'enfin l'horloge, au temps carillonna,
Son coeur soudainement se transforma en glace :
Le brave homme mourut quand minuit résonna.
Mais ce coeur désormais le balancier anime
Pour faire vivre encore au moins quatre cents ans
Ce chêne protégé par les dieux unanimes
Devant l'habileté de ce fol artisan
Oui son coeur désormais le balancier anime
Et l'horloge jamais plus ne s'arrêtera,
Ce chêne tant aimé de ces dieux magnanimes
Un habile artisan toujours l'habitera.
Le 14/04/2014 © JFP
Les étoiles se sont posées
Au sortir de la brume
Par la fenêtre
Je t'imagine nue, accoudée au balcon...
Et peut-être l'es-tu, t'amusant, au passage
De ces mâles courant, de tout ce qui, pas sage
Tourbillonne en ta tête en fantasmes féconds,
Alors que, trop pressés, nul ne voit ce sourire
Qui pourtant en dit long de ce feu qui te cuit
Né de ce jeu naïf : déshabiller autrui
Et laisser le désir un instant te conduire...
Où te mènent dis-moi ces songes de plaisirs
Qui sur un courant d'air glissent entre tes cuisses,
Suggérant à tes sens d'insondables abysses,
Que tu laisses ainsi t'emporter à loisir ?
Rêves-tu que celui qui vient de disparaître
Emprunte l'escalier et entre sans frapper,
Vienne à pas de velours la taille t'attraper
Faisant suite au clin d'oeil jeté par la fenêtre ?
Attends-tu que ses mains remontent sur tes seins,
Qu'un souffle étourdissant à ta bouche il suspende
Et que, les yeux fermés, sa chaleur se répande
Comme se répandrait un délicieux vaccin ?
A moins que simplement ton amant tu n'attendes,
Oubliant le retard qu'il a comme toujours,
Désirant lui offrir ton corps à contre-jour
Pour que son sexe vite avidement se tende...
Quoi que vu ton visage et le cri retenu,
La lèvres que tu mords et les jambes qui tremblent,
Il semble que les vents s'y sont mis tous ensembles
Pour faire déborder ton plaisir contenu ;
Tant pis pour cet amant qui bien trop souvent tarde,
Que tu vois dans la rue, au sourire serein,
Il aura beau l'avoir et droite et bien gaillarde,
Il ne glissera pas dans le creux de tes reins !
Le 08/10/2014 © JFP
Entre ombres et lumières
Amusement
Ma muse ma foi
M'amuse parfois
Mais cette muse là
Un jour me musela
Et depuis je la cherche
Quand je vais à la pêche
Or le vent m'en empêche
D'une douce flamèche
Car ma muse est sans foi
Et s'amuse cent fois.
Je muse toutefois
M'use souventefois
Sur une page blanche
N'en doutez pas je planche
La rime se déclenche
Mais vois, las, que je flanche...
Le 29/05/2012 © JFP