En haut de la falaise au calcaire laiteux,
Les cheveux dans le vent se tient, droit, une femme
Aux yeux cernés d'espoir et brillants de sa flamme
Pour le marin parti chevaucher le grand bleu
S'étendant devant elle. Quelques fois une brume
Vient lui lécher les mains comme pour lui conter,
Par delà l'horizon, l'océan démonté
Quand Neptune irrité fait bouillonner l’écume.
Elle en tremble bien sûr, mais sent parfois l'odeur
De son beau matelot qui ses chairs enveloppe,
S'imagine paraître ainsi que Pénélope
Attendant sans répit son tendre baroudeur...
Les vagues, d'autres fois, chantent Zéphyr qui souffle
En gonflant la voilure ; elle voit le vaisseau
Qui vole sur les flots ou subit leur assaut,
Entend le bois qui craque et la quille qui souffre !
Elle voit la tempête abhorrée si souvent,
Qui fouette le bateau comme fétu de paille
Et cherche à pénétrer la moindre de ses failles,
Qui un jour lui prendra, elle sait, son amant.
Là haut sur la colline, au vent claque sa robe,
Comme un noir étendard sous le soir qui descend
Et répand son feu ocre en rais iridescents,
Alors que l'horizon à la vue se dérobe.
Le soleil lui rappelle en se couchant enfin
Que le lit cette nuit encore sera vide ;
L'onde de ses couleurs se mélange, impavide,
Au gris qui teint le coeur de son sombre parfum
Et la nuit se fait noire ; elle reprend la route,
Quitte son promontoire en laissant son esprit
Errer sur l'océan pour y chercher l'abri
Qu'offrira son marin à son âme en déroute...
Le 04/11/2013 © JFP